Revenir en Gaspésie – Partie 3 : Le rapprochement

Début 2012. J’avais fait mon choix : j’allais quitter Montréal, mais pour aller où? Alors que la Gaspésie semblait le choix évident, j’étais ambivalente. Malgré tout le travail qui est fait par plusieurs organismes pour faire connaître les possibilités de carrières en Gaspésie, je n’étais pas certaine que je pourrais pleinement me réaliser au niveau professionnel. Si j’avais su…

L’une de mes meilleures amies avait vécu une relation similaire à la mienne avec Montréal, mais avec Québec. Une session d’université et elle avait compris que ce n’était pas pour elle. Elle s’était alors établie à Rimouski, une ville que je n’avais jamais vraiment considérée. Une ville qui était, adolescente, dans le top 5 des villes où je n’habiterais jamais. Mais j’ai appris au fil du temps à ne jamais dire jamais…

Je me souviens de la première fois que j’ai pris conscience du potentiel de Rimouski. Nous étions en décembre 2011 et nous revenions d’un temps des Fêtes en Gaspésie. La route pour s’y rendre avait été pénible : 2 h 30 pour sortir de l’île de Montréal, verglas sur l’autoroute 40 pour se rendre à Québec pour y prendre ma sœur au passage. Nous étions arrivés dans la Baie-des-Chaleurs pratiquement au petit matin, exténués d’avoir roulé toute la nuit. Nous devions repartir à peine Noël terminé, parce que mon amoureux travaillait. Ce ne sont malheureusement pas tous les employeurs qui sont sensibles au fait que ta famille habite à une journée de voyage!

Bref, en sortant de la Vallée de la Matapédia et en arrivant à Saint-Joseph-de-Lepage, là où aperçoit le fleuve pour la première fois, je me suis dit : et si on se rapprochait? Après tout, Rimouski n’était qu’aux portes de la Gaspésie (touristique!). Certes, mon image de Rimouski se limitait à ce que j’en connaissais, c’est-à-dire peu de choses. Pour tout dire, je ne connaissais pas du tout la ville et l’image que je me faisais des gens était la même que bien des Gaspésiens : les Rimouskois sont snobs. Pourtant, je peux vous garantir qu’après trois années passées à Montréal, les Rimouskois sont loin d’être snobs!

L’appel du développement régional

Malgré mon diplôme presque en poche, je ne me voyais plus devenir journaliste, pour différentes raisons personnelles. Et si je continuais les études? J’avais toujours été studieuse, mais je ne savais pas si j’avais vraiment ce qu’il me valait pour continuer aux cycles supérieurs à l’université. Mon amoureux devait aussi quitter son emploi, ce qui faisait en sorte que nous allions nous établir à Rimouski sans aucune stabilité financière.

J’étais donc à la croisée des chemins : à travers un printemps 2012 mouvementé, une question me hantait: quelle était la prochaine étape? Finalement, nous n’avons pas renouvelé le bail de notre appartement à Montréal et nous sommes « descendus » à Rimouski une fin de semaine pour repartir locataires d’un appartement dès l’été. Encore une fois, c’est sur un coup de tête que nous avons plongé.

Nous sommes partis de Montréal en juin. J’avais décidé de faire de mon obsession du territoire et de l’identité un enjeu de recherche universitaire : je débuterais un diplôme d’études supérieures spécialisées en développement régional et territorial en septembre à l’UQAR. Et mon amoureux? Un mois et demi après notre arrivée à Rimouski, il a décroché son emploi de rêve qu’il occupe encore aujourd’hui… Mais ce sera le sujet d’un autre texte!

Avec du recul, je comprends que je n’ai pas habité à Montréal dans une période de ma vie qui se prêtait nécessairement à ce déracinement. Malgré ce sentiment d’exil si intense, j’en garde aussi de bons souvenirs et j’ai fait des rencontres qui auront été déterminantes. J’y retourne aujourd’hui avec plaisir, pour des vacances ou en visite et je m’y sens bien : parce que je n’y suis pas prisonnière. Je peux dire que j’ai aimé habiter à Montréal pour apprendre à mieux connaître la ville. C’est assurément ce qui m’a été le plus utile par la suite, car j’ai appris à ouvrir mes œillères. Trop souvent, la méconnaissance d’un milieu nous fait en avoir peur et cultive les préjugés.

J’ai découvert des facettes de Montréal que je n’entendais pas dans les médias et que je ne connaissais pas lorsque j’étais en Gaspésie. J’ai aussi vu la Gaspésie sous un œil différent et j’ai tenté de comprendre comment l’image négative qu’on y associe trop souvent peut continuer de circuler. Je crois sincèrement que la compréhension des enjeux propres aux territoires et l’ouverture face à des réalités qui sont différentes sont les clés qui permettront d’assurer un développement optimal des régions ET des grandes villes du Québec. Mais c’est, encore aujourd’hui, un éternel débat…

Je suis arrivée à Rimouski avec l’impression d’avoir laissé derrière moi une période sombre qui m’aura permis de grandir, mais aussi avec la volonté de découvrir cette ville qui m’offrait la possibilité d’un milieu urbain à proximité du rural. Mais, surtout, à proximité de ma chère Gaspésie. Et j’ai sincèrement cru que je pourrais m’y plaire à long terme.

Jusqu’à ce que je devienne maman.

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Revenir en Gaspésie – Partie 4 : La prise de conscience

À lire aussi

Revenir en Gaspésie – Partie 1 : L’exil
Revenir en Gaspésie – Partie 2 : Le déracinement

Cet article a initialement été publié en 2019 sur l’ancien blogue MAMA Gaspésie.